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Paroles d'exclus : « Être bien dans son corps et dans sa tête »
Publié le 27/05/2013
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reportage

Nous avions assisté à la précédente réunion du Conseil consultatif régional des personnes accueillies (CCRPA) des Pays de la Loire : instance rassemblée par des associations pour permettre aux exclus de donner leur avis sur les politiques qui les concernent. Cette fois, une quinzaine de bénéficiaires ont parlé santé et accès aux soins. Leur aspiration au bien être sera-t-elle entendue ?



Les personnes en précarité ont des choses à dire sur leur aspiration à la santé, à l'ARS ou la DRJSCS de faire remonter (photo : A. Penna).

Qui d’entre nous ne se sent pas touché par la question vitale : « Quelles conditions peuvent vous aider à être en bonne santé ? » Le 3ème Conseil régional consultatif des personnes accueillies (CCRPA) des Pays de la Loire, piloté par l’Uriopss, s’est réuni à Nantes. Y ont participé une quinzaine d’usagers : principalement des résidents de l’association de logement accompagné Nelson Mandela du Mans et des femmes du centre social de Chemillé (49).

Leurs langues se sont déliées, parfois leurs cœurs ouverts, en tout cas les idées ont rempli les post-it. Les préoccupations se rejoignent.

Accéder à ses droits. C’est la condition administrative indispensable pour pouvoir se soigner : avoir une couverture maladie et une mutuelle. Ce qui n’est pas le cas de Chantal. « Je n’ai pas de CMU, pas de carte vitale », confie cette mère de famille de Chemillé (49) qui, depuis le décès de son mari il y a quelques années et sa remise en couple avec un compagnon dépendant de la MSA, attend le transfert de son dossier. « Résultat, je ne vais jamais chez le médecin. Je me soigne toute seule : je vais acheter des médicaments à la pharmacie et je demande à les payer plus tard. »

« Et s’il t’arrive quelque chose ! », s’exclame Annick, mère de 7 enfants « tous en bonne santé », et qui bénéficie elle de la CMU. En juillet, elle va emmener son petit dernier pour une révision chez le dentiste : « Je ne veux pas qu’il ait les mêmes problèmes que moi qui n’ait pas été suivie. »


Autres préoccupations liée aux “institutions” : mieux accéder à l’information, notamment en terme de prévention et de solutions de répit pour les aidants ; accéder à des équipements adaptés et que « les professionnels de la santé expliquent avec nos mots à nous » ; pouvoir faire les démarches en vis-à-vis et non toujours par internet.

« Globalement, la lourdeur et la complexité des démarches peut faire renoncer ceux qui ne sont pas bien accompagnés », résume Amélie, éducatrice de l’association mancelle Nelson Mandela. Elle trouve aussi que « le lien entre le médical et le social est encore trop difficile. »

Avoir le moral, être entouré. Ils y reviennent toujours, en vrac : « être aimé, détendu, ne pas être seule, ne pas se sentir inutile, être respecté, rire, partir en vacances, profiter du soleil… quand il y en a ! »

Comme le formule Jacques, qui dit se sentir mieux quand il est écouté : « Il ne faut pas se laisser aller sinon ça va s’empirer. Il faut aller voir quelqu’un, parler. » Avec ses plaques dans le dos depuis un accident du travail et après 4 ans à la rue, il apprécie vivre au Mans dans une maison relais, « entouré ». Il est enthousiasmé par les rencontres et les discussions qu’il a aujourd’hui.

Famille, amis, voisins, travailleurs sociaux, les relations humaines aident à avoir le moral et la santé, notamment mentale. «  Et les animaux de compagnie ! », lance quelqu’un. Chantal de Chemillé est d’accord : « Au moins, aller promener mon chien me pousse à sortir de chez moi ».


Avoir une bonne hygiène de vie. Pour « être bien dans sa tête et bien dans son corps », les participants sont unanimes : « Il faut prendre soin de soi », malgré les difficultés. Encore en vrac : « Bouger, manger tous les jours, 5 fruits et légumes quand on peut se les acheter, pouvoir cuisinier, bien dormir, consommer avec modération (tabac, alcool, médicaments), prendre des douches, etc. »

Au départ de tout, les participants placent la nécessité de vivre dans un « logement décent », c’est-à-dire propre, aux normes et où l’on est en sécurité. « Les gens à la rue, sans toit, je n’ai pas l’impression qu’ils se sentent tranquilles », fait remarquer Jean-Marc, persuadé que beaucoup aimeraient être logés comme lui à la résidence sociale Nelson Mandela.

Participer à la réflexion. Toutes ses paroles sont consignées par trois représentants de l’Agence régionale de la santé (ARS) des Pays de la Loire, présents en petite souris et non en terrain conquis. Leur agence ferait-elle preuve de “démocratie participative” (incitée par la loi HPST) ? Vincent Michelet, chargé de projet précarité à l’ARS, admet : « Nous sommes en contact avec les associations représentatives mais pas avec les personnes en tant que telles.» Le CCRPA est donc apparu comme un « vecteur » pour « mieux comprendre leur quotidien qui nous échappe. » À son niveau, l’ARS ne peut décider d’augmenter le plafond de la CMU, mais du moins ces retours des personnes concernées doivent l’aider à mettre en place des actions cohérentes, par exemple de prévention ou de médiation. Le fonctionnaire conclut : « Les inégalités de santé sont un sujet majeur sur lequel tous les professionnels de santé mais aussi toute la société doivent se mobiliser. »

Ce n’est pas les participants à ce CCRPA qui le contrediront. Les plus volontaires d'entre eux sont invités à témoigner ensuite directement auprès du comité d’évaluation de l’ARS, qui est précisément chargé en ce moment d’analyser le Plan régional de santé (PRS) sous l’angle de l’accès à la santé des plus démunis (et notamment sa branche dédiée : le PRAPS, plan régional d’accès et de prévention aux soins). Ils devraient aussi pouvoir porter leur parole au sein de la commission d’hébergement et d’accès au logement de la DRJCS.

Armandine Penna
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