« Liquidation judiciaire », les mots sont crus mais, au fond, ils disent correctement les choses. Si nous décidons d’arrêter notre belle entreprise, notre belle histoire, c’est pour des raisons simples et sans appel, des raisons économiques. Le Canard Social n’a pas trouvé l’équilibre, continuer dans ces conditions là ne serait pas responsable.

Ironie amère, notre activité n’a cessé de se développer en 3 ans, chiffre d’affaires, lecteurs, réseau, notoriété, tout marche mais pas assez, ou pas assez vite. C’est l’histoire somme toute banale d’une entreprise créée avec beaucoup d’idées et d’ambition mais avec trop peu de moyens. Trop peu de moyens financiers pour faire face à l’inertie inévitable pour installer et rentabiliser un média.  Alors voilà, Le Canard Social s’arrête.

Le Canard Social a tenté l’Himalaya : viabiliser un média en ligne indépendant, en région, sans capital ou presque, avec quelques fonds levés au démarrage, quelques prêts solidaires ou personnels, dans un contexte morose pour la presse. Nous y avons cru, nous y avons travaillé d’arrache pied pendant 3 ans, mais, là, il faut savoir s’arrêter, avant d’être mis en faillite par autrui.

Quelles sont nos premières pensées ?
Dommage ! Quelle aventure ! Merci ! Nous regrettons…
Qu’est ce que l’on regrette ?
Nous regrettons bien sûr de laisser là nos lecteurs fidèles. Et nous regrettons de ne pas avoir eu le temps de gagner la confiance des autres.

De ne pas avoir réussi à démontrer à ceux qui nous ont soutenu qu’ils ont eu raison de le faire d’un point de vue économique ! Et là nous pensons aux collectivités, (Région, CG44, Nantes Métropole) à France active et Fondes, à la Caisse d’Épargne, à la Mutualité Française, à tous nos partenaires. Nous ne les remercierons jamais assez d’avoir cru en nous, et nous espérons qu’ils sauront se souvenir que malgré tout, durant ces 3 ans, Le Canard Social a fait bouger des lignes, a tissé des liens, a su se rendre utile à un secteur, a innové, a tenté.

Nous regrettons de ne plus nous lever le matin en pensant à nos projets de développement, nos prochains hors-série, nos prochaines Transversales, nos reportages, nos rencontres…
Mais les regrets ne font pas tout et le Canard Social s’arrête fier de lui aussi.
Nous restons convaincus que ce Canard avait, comme on dit, un boulevard devant lui !

La meilleure métaphore trouvée, c'est celle d’une 2CV sur une autoroute, la voiture est belle, la route est bien tracée, mais la voiture est trop lente, pas assez équipée, elle en a sous le pied, mais pas assez sous le capot ! Tout est question de motorisation et de carburant. La 2CV, vaillante, fait ce quelle peut, mais elle rame, et ne peut rivaliser dans le monde des bolides, des voitures bien carénées et sécurisées, son charme ne fait pas le poids.

Alors maintenant ? Nous ferons en sorte que l’ensemble de nos publications soient disponibles librement sur le site actuel. C’est une mine d’info, d’archives, car nous avons fait du bon boulot. Et puis nous allons voguer vers d’autres aventures avec à l’esprit des souvenirs, beaucoup de souvenirs.

Nous sommes tristes mais nous sommes grandis par cette histoire médiatique. Nous sommes tristes mais pragmatiques : nous avons travaillé avec bonheur et enthousiasme pendant trois ans, dans un milieu certes compliqué à bousculer, mais tellement riche humainement.

Nous restons profondément attachés à ce secteur social,  ses enjeux, ses impacts sur notre société, notre vie à tous, et ses militants, inlassables, qui pour bon nombre se cassent les dents chaque jour sur des montagnes de contraintes budgétaires, idéologiques, organisationnelles, institutionnelles et politiques.

On ne lâche rien de nos valeurs ni de nos convictions !

L’équipe du Canard Social

Frédéric Lossent
Marie Olé
Armandine Penna
Sabrina Grippay
David Prochasson
Cécile Petident

Un grand merci au dessinateur de presse Frap