Xavier Emmanuelli, fondateur du Samu Social, avait démissionné de sa présidence l'été dernier (photo: Samu Social international).
Une grande frustration. Interrogé sur le débat électoral, Xavier Emmanuelli, aujourd’hui président du Samu Social international, ne mâche pas ses mots : « On n’a pas abordé le problème du logement, de la santé. Comme si ces questions étaient transparentes. Il n’y a pas de réflexion, seulement un espace de consensus. Les élus sont séparés des problématiques de terrain et de la peine des gens qui souffrent. »
On pourrait penser le propos précieux venant d’une figure de l’urgence. Sauf que bien souvent, Xavier Emmanuelli se montre aigri, faisant l’économie d’expliciter sa pensée devant « la complexité des questions ». « A 73 ans, j’ai fait ce que j’avais à faire. Je suis un imprécateur, une voix dans le désert, considère-t-il avant de lâcher : nul n’est prophète en son pays. »
« Une pensée paresseuse »
On se souvient que Xavier Emmanuelli avait démissionné à grands fracas du Samu Social l’été dernier. « On considère que pendant l’hiver, il y a une urgence et qu’après, il n’y en a plus, a-t-il dit, revenant sur cet épisode. Moi, je cherchais une méthode pérenne qui permettrait de franchir un cap. Mon analyse était médico-psycho-sociale. » Le médecin urgentiste dénonce au passage la politique du Logement d’abord. « Pourquoi doit-on prioriser ? Pour accéder à un logement, il faut être préparé à l’intégrer. Pourquoi ne pas mettre en place le caring first ? » Est-il le seul à porter ces critiques ? C’est en tout cas ce qu’il soutient sur un ton acrimonieux. « Qui critique le Logement d’abord ? La Fnars ? C’est une plaisanterie, lâche-t-il nous enjoignant de lui apporter une bibliographie de ceux qui font valoir une parole critique.
Il termine l’échange en expliquant que « personne, aujourd’hui, n’arrive à conceptualiser le mal-être et à mettre des mots dessus. On fait face à une pensée paresseuse et toute faite sur l’insertion, les phénomènes de migration, la famille, le vieillissement. » On aimerait en savoir plus mais l’auteur ne s’en donnera pas la peine. « Vous en savez assez, là, non ? » Dommage. Car si Xavier Emmanuelli met le doigt sur des points essentiels, il a certainement bien plus à apporter qu’un discours désabusé et las.
David Prochasson
* Xavier Emmanuelli donne une conférence ce jeudi 26 avril à 20h30 à Nantes, chapelle de l'Immaculée (rue Malherbe). Il s’exprimera, à l’initiative de l’organisation jésuite Les chemins ignatiens, sur le thème « Où sont passés les pauvres ». Participation: 5 €.