Le jeudi 7 juin, dans toute la France, les troisièmes années de la formation assistant de service social passaient la dernière grande épreuve écrite de leur diplôme : celle du domaine de compétence 4 (DC4) intitulée « Connaissance des politiques sociales et implication dans les dynamiques institutionnelles et partenariales ». 4 heures apparemment très éprouvantes si l’on en croit les propos qui ont fusé après.
Beaucoup de réactions ont circulé sur la toile, comme par exemple cet échange du 8 juin sur un forum du site « Le social », dont nous retranscrivons un extrait fautes comprises :
- Mathieu : « Le sujet était innatendue, aucun cours dessus et n'était pas non plus dans les 12 thémes de politiques sociales que j'ai révisé!!!! je ne pense pas que les centres de formation vont se mobiliser alors il faudrait que nous fassions quelques chose mais je ne sais quoi! qui a des idées? »
- Anaïs : « je te rejoints.... j'ai rien compris a ce sujet.... je suis même au fond du trou depuis hier soir...... mais que faire??? »
Passée la surprise…
Grâce à ces forums, les étudiants de l’ARIFTS-Safrants d’Angers se sont rendus compte qu’ils n’étaient pas les seuls à avoir séché sur l'intitulé du sujet. Les trois questions les testaient sur la « réussite scolaire » et les lois de 2005 de programmation pour la cohésion sociale et l’avenir de l’école. « Un choix injuste car ne mettant pas en œuvre nos compétences », déplore Émilie Geantet, une étudiante qui a décidé de relayer le désœuvrement de sa promotion.
L’étudiante, remontée, détaille les points qui fâchent.
D’abord, le DC4 est censé être en lien avec l’actualité. Vu le contexte électoral, les étudiants s’attendaient plutôt à un sujet en rapport avec la politique du gouvernement sortant, par exemple sur l’immigration ou la dépendance.
Ensuite, la question de la « réussite scolaire » (et même pas de la réussite éducative) reste très marginale dans la pratique des assistantes sociales.
Enfin et surtout, la troisième question, qui est traditionnellement une mise en situation pratique était formulée ainsi : « Vous êtes assistant de service social dans un collège et un lycée situés en zone d'éducation prioritaire (ZEP). En vue de favoriser la réussite scolaire des élèves, proposez un projet global d'intervention précisant le partenariat que vous envisagez de mobiliser. » Hors sujet, selon Émilie Geantet : « Définir ce genre de projet et partenariat ne relève pas de la compétence assistantes sociales, qui elle sont chargées de la mise en œuvre, mais c’est le rôle des cadres socio-éducatifs.» Une de ses camarades de promotion qui a fait son stage dans l’Éducation nationale a demandé son avis à une assistante sociale en poste dans ce secteur. Cette dernière a fait circuler l’intitulé du sujet. Les professionnels ont eu la même réaction que les étudiants.
…place à la mobilisation
« On s’est presque dit que le but était qu’il n’y ait plus d’AS qui sortent de l’école », affirme dépitée Émilie Geantet. Certains sont sortis de la salle d’examen en larmes, persuadés que c’était fichu pour cette année. Et la fête prévue pour le soir même s’est transformée en soirée débat sur le thème : que faire pour sauver notre diplôme ? Car cette épreuve a un fort enjeu. Pour obtenir le diplôme d’état, il faut obtenir un 10 minimum dans chacun des 4 domaines de compétence. Or cette épreuve écrite compte pour 2/3 du DC4 (le tiers restant étant du contrôle continue).
Les étudiants ont envoyé une lettre aux responsables des certifications et formations aux professions sociales de la DRJSCS (Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale) et fait suivre une copie à l’ANAS (Association nationale des assistants de service social). Ils ont aussi lancé une pétition qui circule à son tour sur les forums. Leurs demandes : la clémence du jury qui va corriger leurs feuilles presque blanches et l’organisation d’une cession de rattrapage en septembre (à l’heure actuelle, il n’y en a pas, les élèves qui n’ont pas la moyenne doivent repasser l’année d’après).
Leurs formateurs, tout aussi déstabilisés par le contenu du sujet, les soutiennent dans ces démarches. Certains en auraient parlé directement avec le jury à Rennes. « Ce qui nous préoccupe, ce n’est pas les élèves qui ont répondu tant bien que mal avec les moyens du bord, mais bien ceux qui se sont retrouvés paralysés par ce sujet et ont rendu une feuille quasiment blanche », explique Jean Martin, formateur à l’ARIFT-Safrants d’Angers, pas spécialiste du DC4 mais qui en a beaucoup parlé avec ses collègues. Il fait remarquer que de toute façon, je jury ne pourra pas éliminer trop de candidats.
Une démarche officielle de la direction de l’école est espérée. En attendant, les étudiants essaient de ne pas baisser les bras pour passer leurs soutenances orales.
Armandine Penna