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Têtes de réseaux :
un exercice d’équilibriste
Publié le 03/10/2012
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Quel est le rôle des têtes de réseaux ? C’est la question à laquelle ont réfléchi les participants d’un atelier de la Transversale du Canard Social du 2 octobre à Rennes. Autour de la table, trois représentants des réseaux de l’action sociale en Bretagne : la Fnars, l’Urei et l’Uriopss. Ils ont confronté leurs points de vue avec une responsable de la Caisse d’Épargne Bretagne Pays de la Loire, l’un de leurs partenaires habituels. Brainstorming.

Lire également notre article "Transversale du Canard social : réseau, vous avez dit réseau ?"



Lors de la Transversale du Canard social du 2 octobre à Rennes sur les réseaux, les ateliers ont permis de confronter les points de vue (photos : A. Penna).

Être plus fort

Un réseau, ça sert d’abord à ne pas rester seul. Et évidemment à être plus fort. « Être représenté, c’est faire force, tranche Jean-Jacques Danton, de la Fnars Bretagne. Individuellement, on est condamné. » Être ensemble pour faire quoi ? Pour échanger, pour mutualiser les bonnes pratiques et les outils techniques. Mais aussi « pour coordonner, pour animer, pour contribuer au développement des adhérents », considère Sophie Stéphan, responsable du développement coopératif et solidaire à la Caisse d’Épargne Bretagne Pays de la Loire.

Défendre l’intérêt général

Être ensemble implique logiquement une notion de consensus pour défendre des intérêts collectifs. Un consensus qui n’est pas toujours facile à dégager, comme l’explique Daniel Hardy de l’Uriopss : « Un réseau se caractérise par la réunion d’acteurs qui ont des choses en commun et d’autres qui les distinguent.» Il est donc naturellement en tension entre la volonté de se réunir et celle de conserver ses particularismes. « C’est important de le prendre en compte pour représenter les projets communs de nos adhérents », reconnaît Éric Challan-Belval, de l’Urei. Et pour cela, selon Jean-Jacques Danton, « il faut faire primer la loi de l’intérêt général plutôt que celle du plus grand nombre ».


Exercice proposé aux participants de l'atelier : "écrivez la liste de vos attentes vis à vis des têtes de réseaux".

Influencer les décideurs

Pour défendre l’intérêt général des structures, les têtes de réseaux doivent se positionner politiquement et faire remonter des revendications. « L’expertise de nos techniciens permet de bien comprendre le fonctionnement de l’État, d’être présent dans les lieux de décision et de faire du lobbying », explique Éric Challan-Belval de l’Urei.

Mais entre lobbying et co-construction des politiques avec l’État, les réseaux sont parfois pris entre deux feux. La Fnars en a fait l’amère expérience avec son implication dans la politique du Logement d’abord, souvent décriée par les professionnels de l’insertion. « Ça n’a pas été un épisode simple dans la vie de la Fnars, qui a été vue comme le suppôt du gouvernement. On s’est même demandé comment on allait pouvoir s’en sortir, confie Jean-Jacques Danton. Sur le fond, la Fnars a toujours dit, oui, il faut faire évoluer le dispositif. Sur la forme, on s’est vite retiré. » Le responsable de la Fnars l’avoue : « c’était une manière élégante de pouvoir retomber sur nos pieds. Il faut bien le dire : les adhérents commençaient à prendre des distances, ce qui a fait l’objet d’échanges assez vifs. »


Pour Éric Challan-Belval de l’Urei, les têtes de réseaux ont une expertise, des valeurs et des idées à faire valoir. Mais ne savent pas communiquer.


Communiquer des idées

Pour se faire entendre non seulement par les politiques mais aussi par la société civile, les têtes de réseau ont un rôle majeur à jouer en terme de communication. « La communication doit être inscrite dans le projet essentiel des unions qui doit s’en donner les moyens, considère Daniel Hardy, de l’Uriopss. Au-delà de l’action de chacun, on doit communiquer sur ce qu’on est collectivement. On a un travail de reconnaissance de notre place dans une société démocratique. »

Mais historiquement, communiquer n’a pourtant jamais été le fort du secteur social, parfois renfermé sur lui-même. « Notre monde de l’insertion a refusé le marketing et la communication : c’est une connerie monumentale, s’exclame Éric Challan-Belval de l’Urei. D’autres communiquent sur des valeurs qu’ils n’ont pas. Il faut que nous utilisions nous aussi les techniques de marketing et de communication, pour communiquer sur les valeurs que nous avons. » Et faire connaître les innovations sociale qui sinon peuvent être récupérées par d’autres.

Selon Éric Challan-Belval, la tâche est aussi rendue difficile par le fait que « les politiques comme les journalistes ne veulent voir qu’une seule tête. Rentrer dans la nuance, pour eux, c’est compliqué ». Face aux difficultés de toucher les médias, la meilleure méthode, selon Jean-Jacques Danton, c’est le regroupement en inter-réseaux, pour que « La presse se dise : “s’ils font ça ensemble, ça doit être important” ! »


Jean-Jacques Danton, de la Fnars Bretagne, défend l'action en inter-réseaux. Ce qui est parfois plus facile à dire qu'à faire.

Un secteur illisible ?

Le manque de visibilité du secteur est aussi une conséquence de son manque de lisibilité. « En tant que partenaire, j’ai le sentiment d’avoir du mal à naviguer avec vos adhérents, souligne Sophie Stephan à la Caisse d’Épargne. Vous n’imposez pas les choses, vous êtes dans la concertation. Ce qu’on connaît moins dans le secteur bancaire : on a un chef de réseau qui décline une politique et on avancePour le partenaire privé, c’est parfois compliqué à comprendre et on a envie de vous pousser à aller plus vite. »

Et ce manque de lisibilité de chaque réseau se double de celui du secteur dans son ensemble. Un secteur qui, de l’extérieur, finirait par ressembler à un patchwork d’organisations. « Quand on a la Fnars, l’Urei, le Coorace, Chantiers école, l’Uriopss… On est sur des secteurs d’activité qui se mélangent », déplore Sophie Stephan à la Caisse d’Épargne. Faut-il réduire pour autant le nombre de réseaux ? Jean-Jacques Danton, à la Fnars, mise plutôt sur le renforcement de l’inter-réseaux. « Dans nos CA réciproques, il y a des têtes communes. En ce sens, il y a interdépendance. Et aucun ne peut prendre une position sans impliquer les autres têtes de réseaux. »

« Attention toutefois au millefeuilles, met en garde Sophie Stephan. En Pays de la Loire, on retrouve des inter-réseaux par départements avec des acteurs et des messages politiques différents et des budgets supplémentaires : le partenaire ne peut pas suivre. »

Quelle place pour les petits ?

Autre limite en forme de paradoxe : ce sont les petites structures qui ont le plus besoin du soutien d’un réseau et qui peinent le plus à y être représentées. « Les petits adhérents mobilisent plus difficilement des moyens pour être présents aux réunions », reconnaît Jean-Jacques Danton, de la Fnars. Et c’est un fait, « plus on monte dans la hiérarchie, plus ce sont les grosses structures qui sont représentées, explique Éric Challan-Belval, de l’Urei.  C’est pareil à Bruxelles, ce sont les grands groupes, par exemple, qui sont représentés au détriment des PME, il faut veiller à ne pas reproduire ce schéma. »

David Prochasson 

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