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Transversale du Canard Social :
Réseaux, vous avez dit réseaux ?
Publié le 03/10/2012
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Peut-on vivre sans réseaux dans l’action sociale ? Que faut-il en attendre ? Faut-il s’en méfier ? Une soixantaine d’acteurs du secteur social en ont débattu avec des décideurs du monde économique le 2 octobre à Rennes lors de la matinée « Transversale » du Canard Social. La première du genre en région Bretagne, organisée en partenariat avec la Caisse d’Epargne Bretagne - Pays de la Loire et le Conseil général d’Ille-et-Vilaine. Voici ce qui ressort des échanges sur les opportunités et les limites du « réseautage ».

Lire également notre article sur les têtes de réseaux



Témoignages, débat et perspectives au menu de la Transversale à Rennes sur les réseaux (photos : Armandine Penna).

Le réseau ? Comme l’a fait remarquer avec ironie une participante à la Transversale, « C’est un mot valise qui évoque des notions et des réalités très différentes. » Que l’on soit professionnel, élu, bénévole ou partenaire du secteur social, impossible d’y couper : les réseaux formels ou informels sont incontournables. Mais chacun s’en approprie une définition.

Il y a par exemple la définition d’ordre général de Jacky Desdoigts, le directeur de l’Adapei des Côtes d’Armor : « C’est la mise en synergie d’intelligences et de compétences qui vont amener à créer des choses nouvelles… Des choses qu’on ne pourrait pas faire normalement. » Alors on pense spontanément aux réseaux traditionnels : celui des acteurs de l’insertion, celui des professionnels du handicap… Mais pas seulement.


Jean-Yves Praud, vice-président du CG 35 : «Un réseau, ça peut aussi être moins formel et moins vertical.»


« Des réseaux organisés comme la Fnars ou le Coorace sont des partenaires incontournables du Département,
reconnaît Jean-Yves Praud, le vice-président du Conseil général d’Ille-et-Vilaine. Mais un réseau, ça peut aussi être moins formel et moins vertical. Notre volonté est d’amener des acteurs à constituer des réseaux en dehors des grandes filières pour travailler de manière plus transversale sur un projet ou une réponse.»

Cette carte de l’ouverture et du décloisonnement, l’élu du CG 35 n’est pas le seul à vouloir la jouer. Voilà un chef d’entreprise qui ne pense pas autre chose : il s’appelle Michel Mezard et il est membre du Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) de Saint-Nazaire. Il est intervenu à la Transversale pour donner son point de vue de décideur économique, finalement pas si éloigné des préoccupations du secteur social. « Un réseau permet d’influer sur un territoire car une entreprise n’est pas ”hors sol”. Si on est isolé, le territoire ne nous entend pas. Or il faut qu’on soit entendu pour pouvoir agir. »


Michel Mezard du CJD de Saint-Nazaire : «Il faut qu’on soit entendu pour pouvoir agir.»


Pourquoi on « réseaute » ?

C’est indéniable, certains viennent chercher une bouée de sauvetage dans un contexte de fortes contraintes budgétaires. « Pour des petits opérateurs qui subissent des pressions, déplore Jacky Desdoigts de l’Adapei 22, des réseaux se construisent par obligation pour éviter la fusion ou la disparition. » Daniel Hardy, le président de l’Uriopss le reconnaît lui aussi : « Au niveau de l’État, la mutation tout à fait majeure qui encourage des mutualisations, des coopérations voire des fusions a un impact sur les réseaux. »

Ceci dit, il y a aussi le réseau qu’on désire. Pour la plupart des acteurs qui ne sont pas le dos au mur, la motivation première est de développer une activité ou de trouver de nouvelles ressources financières. « On fait du réseau pour le business, ce n’est pas sale et il ne faut pas se le cacher, insiste Michel Mezard du CJD. Mais il n’y a pas que ça. Le réseau peut aussi servir l’intérêt général. » Illustration avec le Comité Régional du Travail Social (CRTS) qui est présidé par Jacky Desdoigts de l’Adapei 22. « Ce comité de 60 acteurs publics et privés produit de la réflexion et des avis sur l’évaluation, l’usure professionnelle ou l’expression des usagers. La richesse, c’est qu’on travaille en interdisciplinarité. »


Daniel Hardy, président de l'Uriopss de Bretagne : « Les acteurs que nous représentons à l’Uriopss portent avant tout un projet social.»


Entre le développement économique et l’intérêt général, Daniel Hardy le président de l’Uriopss de Bretagne a choisi : « C’est probablement la combinaison des deux stratégies. N’oublions pas que les acteurs que nous représentons à l’Uriopss portent avant tout un projet social. » Message reçu 5 sur 5 par Jean-Yves Praud le vice-président du CG 35. Pour lui, « il y a, au delà de l’efficience, le temps du partage des valeurs. Car, poursuit l’élu, nous sommes convaincus qu’il est nécessaire de coller à la réalité des besoins. Mais il ne faut pas le faire de manière solitaire : il y a plus d’intelligence dans plusieurs têtes que dans une seule. »

Qu’est-ce qui fragilise les réseaux ?

« Attention à la lourdeur institutionnelle », prévient Jacky Desdoigts de l’Adapei 22. Chacun en convient, un réseau doit être efficace. S’il devient une usine à gaz improductive, c’est la disparition assurée ou l’inutilité garantie. « Comment rester attractif face aux enjeux d’aujourd’hui ? » se questionne Daniel Hardy de l’Uriopss. Il émerge régulièrement des réseaux informels, ce qui est significatif pour certains de refonder convention. » Facon de dire que la nature a horreur du vide et que personne n’a envie de perdre son temps dans des réseaux qui ne mènent à rien.


Marie-France Ferret, Chantier école : « Un savant équilibre entre ce qu'on amène et ce qu'on reçoit.»


Lors de la table ronde, les intervenants n’ont pas donné de réponse clé en main face à l’enjeu d’attractivité des réseaux. Marie-France Ferret, administratrice de Chantier École et membre du CESER de Bretagne défend le principe de réalité : « Il ne faut pas se raconter d’histoires. On attend beaucoup des réseaux : ils ouvrent de grandes portes mais ils n’enlèvent pas la responsabilité de chacun et de chacune. » Autrement dit : on a les réseaux qu’on mérite. On ne peut pas bénéficier d’un réseau sans l’alimenter et le faire vivre. « C’est, glisse Marie-France Ferret, un savant équilibre entre ce qu’on amène et ce qu’on reçoit. »

D’autres risques pèsent aussi sur les réseaux. Jacky Desdoigts de l’Adapei 22 pointe la menace des appels à projets qui mettent en concurrence les acteurs de terrain. « Cette logique peut amputer notre créativité et elle fragilise nos réseaux. » Face à cette crainte, Daniel Hardy de l’Uriopss en appelle à « éviter de s’engouffrer dans les concurrences et à favoriser les concourrences. » Une position au nom de « la liberté d’initiative des associations » qui est bien évidement plus facile à exprimer qu’à appliquer concrètement.


Jacky Desdoigts, directeur de l'Adapei 22 : « Les appels à projets fragilisent nos réseaux.»


Enfin, le débat a fait émerger un autre élément fondamental à prendre en compte dans la logique de réseau : la place des usagers. Jean-Jacques Danton, le président de la Fnars regrette que les réseaux des professionnels et leurs partenaires ne parlent pas beaucoup des personnes accueillies dans les structures sociales et médico sociales. « Nous devons être vigilants pour que l’usager final ait du pouvoir au sein de nos réseaux. C’est quand même pour eux que nous agissons. »

Frédéric Lossent

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